À ton étoile

Source : Le Serpent de la Genèse, première septaine, Le Temple de Satan par Stanislas de Guaita, coll. Essais de Sciences maudites.

Il est écrit dans le Zohar Hadasch, section Yitro, page 29, que le Tentateur, Samaël, complota de concert avec sa femme Lilith, la séduction du premier couple humain. La compagne du Malin n’eut point de peine à corrompre la vertu d’Adam, qu’elle souilla de son baiser ; le bel archange Samaël s’y prit de même pour déshonorer Ève ; et telle fut la cause de la mortalité humine. Le Talmud ne s’exprime pas en termes moins formels ; je cite textuellement : « À l’heure où le Serpent se mêla à Ève, il jeta en elle une souillure dont l’infection s’est transmise à tous nos descendants. » (Sabbath, fol. 146, recto) Souvent, les expressions sont si crues qu’on hésite à les traduire. À d’autres pages, le démon mâle prend le nom de Léviathan et la diablesse celui d’Héva.

Cette Héva aurait joué longtemps en Éden le rôle d’épouse auprès d’Adam, avant que le Seigneur eût tiré de son flanc l’Ève véritable, primitivement Aïsha, puis Héva, ou Chavah. Des amours d’Adam et d’Héva-couleuvre, seraient nées des légions de larves, de succubes et d’esprit semi-conscients, des élémentaux. Au reste, les rabbins font de Léviathan une sorte d’androgyne infernal, dont l’incarnation mâle, Samaël, est pour eux le Serpent insinuant et l’incarnation femelle (Lilith) la couleuvre tortueuse, voir le Sefer Ammudé-Schih-a, fol. 51, col. 3 et 4) Ces deux monstres seront anéantis à la fin des temps, ainsi qu’on peut le lire au Sefer Emmeck-Ameleth ; « Dans les temps à venir, le Très-Haut, béni soit-Il, égorgera l’impie Samaël, car il est écrit : en ce temps-là, Jéhovah visitera de son épée terrible Léviathan, le serpent insinuant qui est Samaël et Léviathan, la couleuvre tortueuse qui est Lilith » (fol. 130, col. 1, ch XI)

Lilith n’est pas, selon les rabbins, l’unique épouse de Samaël : ils en nomment trois autres : Aggarath, Nahémah et Mochlath. Mais de ces quatre diablesses, Lilith partagera seule la terrible punition de son époux, pour l’avoir aidé seule à séduire Adam et Ève. Aggarath et Mochlath ne jouent qu’un rôle assez effacé ; il n’en est pas de même des deux autres sœurs.

Prions Éliphas Lévi de compléter ces quelques enseignements et nous en aurons fini avec cette démonologie des rabbins. « Il y a dans l’Enfer, disent les kabbalistes, deux reines des Stryges, l’une, c’est Lilith, la mère des avortements, et l’autre, c’est Nahéma, la fatale et meurtrière beauté. Quand un homme est infidèle à l’épouse que lui destinait le ciel, lorsqu’il se voue aux égarements d’une passion stérile, Dieu lui reprend son épouse légitime et sainte, pour le livrer aux embrasements de Nahéma.

Cette reine des Stryges sais se montrer avec tous les charmes de la virginité et de l’amour ; elle détourne le cœur des pères et les engage à l’abandon de leurs devoirs et de leurs enfants ; elle pousse les hommes mariés au veuvage et force à un mariage sacrilège les hommes consacrés à Dieu. Lorsqu’elle usurpe le titre d’épouse, il est facile de la reconnaître : le jour de son mariage, elle est chauve car la chevelure des femmes étant le voile de la pudeur lui est interdite pour ce jour-là ; puis, après le mariage, elle affecte le désespoir et le dégoût de l’existence, prêche le suicide et quitte enfin avec violence celui qui lui résiste, en le laissant marqué d’une étoile infernale entre les yeux. Nahéma peut devenir mère, mais n’élève jamais seule ses enfants ; elle les donne à dévorer à Lilith, sa funeste sœur.

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