Que sais-je de l’existence de Tokyo ou même de Paris ? Cela est vérifiable et démontrable, me dit-on. Oui, sans doute, mais par leur propre et unique méthode, et pour autant que j’y consente, au départ ; l’existence de Tokyo se prouve empiriquement, celle de l’identité — métaphysiquement — celle du point — mathématiquement — mais aussi celle du Diable — théologiquement.
Il est impossible de prouver le Diable empiriquement, cela est vrai ; mais aussi impossible que de prouver l’existence de Paris mathématiquement ou théologiquement. Chaque méthode pose un langage et par là, un mystère ; toute chose débute par un mythe. Le péché originel n’est donc pas davantage un mythe que la matière, l’énergie ou l’atome. Le diable existe pour Baudelaire. Ce qu’il dit, il est certain que Baudelaire n’a pu y répondre, et davantage clair que je ne saurais le faire. Disons tout simplement qu’une fois là, il ne restait plus à Baudelaire que de vivre jusqu’au bout cet état où l’espérance est soufflée et morte à jamais, qui brillait aux carreaux de l’Auberge.
Et qui sait ? Par l’âme de Tibère et du Marquis de Sade ! Il se peut qu’il y a quelque chose à glaner sur le terrain du Diable. La première découverte que Baudelaire fit dans le domaine du Diable fut, si incroyable que cela paraisse, que… le Diable existe.
Benjamin Fondane : Baudelaire ou l’expérience du gouffre
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