« Do what you will ; the world’s a fiction and it is full of contradiction »

La loi absurde, la grâce, ne tien pas compte du bien et du mal ; elle devrait n’accorder ses faveurs qu’au Bien, mais en fait, « nous sommes obligés de le reconnaître », elle accorde souvent ses faveurs au mal. Le Diable ne dispose pas que des actions extérieures méchantes, comme Baudelaire le disait dans sa lettre à Flaubert, il dispose aussi de la béatitude. Il est donc le Bien, l’incarnation même du « goût de l’infini », qui est le levier fondamental de l’univers baudelairien, levier d’autant plus énigmatique et troublant que, d’éducation catholique, Baudelaire n’osera que suggérer ce que le protestant William Blake dira sans hésitation : « Le Désir de l’homme étant infini, sa possession est infinie et lui-même est infini. » Mais il vaut mieux arrêter là la suite des découvertes faites par Baudelaire sur les terrains du Diable ; car, si c’est lui qui éteint tous les carreaux de l’auberge et lui encore qui nous offre la béatitude paradisiaque, le Diable serait… Ce sera encore Blake qui nous le dira : « Celui qui voit l’Infini en toutes choses, voit Dieu. Celui qui n’y voit que la Raison ne se voit que lui-même. »

Mais ces propositions sentent déjà fortement le fagot.

Benjamin Fondane : Baudelaire, l’expérience du gouffre


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