On les imagine mal,
ces œuvres, au fond d’une chapelle, proposées à l’admiration des fidèles. On
voit mal comment ces pages de cahiers, ces modèles réduits, ces bouts de
carton, ces morceaux de nappes de bistrot, qu’on ne peut souvent voir que si on
a le nez dessus pourraient ressouder une communauté. Des isolés, mes peintres.
S’adressant à des isolés. Disant l’insurmontable isolement. Je reconnais :
pas des athlètes, mes petits maîtres, pourtant, paradoxe, c’est eux dans les
musées qui cognent le plus fort sur nos gueules d’humains muselées. C’est eux
qui en disent le plus long, le plus profond sur l’increvable muse de notre
espèce médusée ; c’est eux, avec leurs moyens rudimentaires, leur santé
fragile, leur vie ratée qui dressent le tableau le moins frelaté, le moins
complaisant, le plus véridique, le plus insupportable de notre condition d’encoconnés.
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