Evil

 

Le minuscule ver qui s’introduit dans le fruit avec la vitesse de la vérité et qui va forer ses galeries dans le bel Enfer décoré, dissimulé, colmaté à coups de nappes de plâtre, de fresques et de panneaux de bois peinturlurés, c’est la progéniture miniaturisée du serpent biblique, son célèbre ancêtre, qui vient nous rappeler ce qui n’a pas été entendu, à savoir qu’il y a eu chute, que le Mal existe, et qu’il est dans l’homme, cause de sa possible damnation, mais aussi bien seule source de sa liberté. Que le chaud anonymat de la corporation, de la communauté sociale ou religieuse, de toute foule, est terminé. Que la solitude de l’Un est absolue, qu’elle se manifeste dans le nom que désormais le peintre va inscrire sur sa toile : le Un s’adressant au Un et non plus à un ensemble de croyants. Que l’angoisse est inévitable et que c’est elle qui a fait trembler la main du peintre, que le tremblement s’est propagé à la peinture et de la peinture à la main qui ici l’écrit.

Jacques Henric : La Peinture et le Mal

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