In hoc signo vinces

 

Source : Le Tarot, histoire, iconographie, ésotérisme, par Gérard Van Rijnberck, éditions Dervy.

Dans une époque très reculée, les sages hiérophantes dépositaires de la tradition occulte de l’Égypte, s’étaient réunis pour discuter d’un grave problème. Par leurs facultés prophétiques, ils avaient acquis la certitude que, dans un temps prochain, la civilisation égyptienne serait détruite, et, avec elle, les temples des dieux, les sanctuaires du culte public et secret, ainsi que les Écoles initiatiques où s’enseignait la Vérité métaphysique. Il s’agissait donc de rechercher le moyen de préserver de la destruction complète les points les plus importants de la doctrine occulte. Plusieurs procédés furent proposés par les membres du conseil des hiérophantes.

« Peignons les textes des axiomes sur les murs les plus solides du temple le plus vénérable » disait l’un mais on lui objectait que la rage des envahisseurs et la force destructive du temps n’épargnait pas l’édifice. « Gravons-les sur des plaques de métal le plus résistant » proposait un autre, mais lui répondait-on : « Si c’est un métal non précieux, il ne résistera pas à la rouille, et, s’il est précieux, il sera inévitablement sujet à la convoitise. »

Un troisième hasarda : « Confions nos arcanes à un homme simple mais vertueux qui en conservera le secret et le transmettra avant sa mort à une autre âme également simple et vertueuse, et ainsi de suite jusqu’au moment où la vérité pourra être de nouveau professée et comprise. » Mais on lui opposait que la vraie simplicité de l’âme est chose rare et que la vertu est sujette à la tentation.

Alors, le plus jeune des adeptes parla ainsi : « Servons-nous des vices, des péchés, des mauvaises passions de l’homme pour préserver le dépôt de nos doctrines secrètes : exprimons celles-ci symboliquement par des figures apparemment innocentes, qui, multipliées à l’infini, puissent servir à assouvir une des passions les plus vives de l’homme : la passion pour le jeu. Confions aux énergies du Mal la préservation des germes de Vérité qui contiennent la condition du Salut et du Bonheur du Monde. »

Cette proposition fut acceptée. Les Adeptes fixèrent donc en images symboliques les axiomes fondamentaux de leur Doctrine secrète : ils en firent un jeu qu’ils mirent en circulation et qui, diffusé à l’infini, préserva réellement sous cette forme allégorique les Vérités cachées.

Cette légende sur l’origine du Tarot m’a été racontée par Valentin Tomberg qui l’aurait apprise en Russie où elle faisait partie de l’enseignement préparatoire d’une puissance société occulte de l’époque, antérieure à la Révolution bolchevique. Actuellement, il n’est guère probable que des membres de cette société survivent. Il paraît en outre, selon ce même Tomberg, que cette légende était connue parmi les Chevaliers de Malte dans la Pologne de jadis et qu’elle aurait été imprimée pour la première fois par Papus en 1889 dans son Tarot des Bohémiens.

Si, vraiment, comme le veut la légende, les Sages ont caché délibérément leurs secrets dans le jeu de Tarot, leur but a été parfaitement atteint. En effet, pendant des siècles on les a considérés simplement comme des objets servant de passe-temps, d’amusement, de vrai jeu enfin, ou encore comme un instrument étrange servant aux commères et aux Bohémiens errants pour dire la bonne aventure aux gens crédules.

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