Pris sur Doorbraak. Harvey Weinstein, monstre ou bouc émissaire ? Probablement un peu des deux par Johan Sanctorum, traduction du néerlandais et notes par Nedotykomka.
Le 6 janvier 2020, fête de l’épiphanie, s’est tenu à
Manhattan le procès de l’ancien producteur Harvey Weinstein : il risque la
perpétuité pour viols et abus sexuel et la sélection d’un jury impartial
constitua un épisode à lui seul dans cette affaire surmédiatisée. Au total,
plus de 80 femmes accusent le producteur de les avoir forcées à des relations
sexuelles mais au bout du compte, seules deux plaintes ont été retenues : celle
de son ancienne assistante Mimi Haleyi et celle d’une « victime » dont
l’identité n’a toujours pas été révélée. Toute tentative pour remettre cette
affaire en perspective s’attire les foudres du politiquement correct, raison de
plus pour tenter de déplacer les lignes. Voici quelques pistes et
franchissements.
Première constatation : il s’agit d’une mise en scène.
Depuis la révélation initiale du New
York Times du 4 octobre 2017 jusqu’à aujourd’hui, nous
sommes aux premières loges d’un grand règlement de comptes entre des actrices
plus toutes jeunes et un super-producteur déchu au rang de pervers et de
prédateur sexuel. Même ses amis démocrates, Hilary Clinton en tête, ont
abandonné Weinstein et rejoignent les pleureuses. Chaque jour nous vaut une
nouvelle révélation, un numéro de victimisation et de pathos, au cas ou nous
n’aurions pas encore compris qui sont les gentils et le méchant.
En somme, on se croirait dans un film, ce qui n’échappe
pas à Weinstein lui-même qui déclarait sur le ton de la plaisanterie que le
scénario était bien ficelé. Depuis, des people comme Angelina Jolie ou Gwyneth
Paltrow sont entrées dans le jeu et nous ont fait leur numéro de tragédiennes.
Weinstein lui aussi en donne au public, avec cette scène pathétique où il
arrive en déambulateur. À quand une adaptation en télé-série avec lui-même dans
son propre rôle?
Émocratie as usual. Après tout, nous sommes à
Hollywood, haut-lieu de l’industrie cinématographique, dans les parages de Los
Angeles — cette implantation du pôle spectaculaire s’explique par les
conditions climatiques ; à l’époque, on ne pouvait filmer que par beau temps.
Depuis, plus rien là-bas ne se passe sans l’aide des projecteurs ou le regard
des caméras, non seulement la promotion des films mais aussi la vie privée des
vedettes, les cérémonies des Oscar, des Golden Globes, etc. Le scandale
Weinstein survient dans un petit monde ultra-narcissique et exhibitionniste.
Dans le courant de l’année 2017, le Time décerna le titre de «
personnalités de l’année » aux « briseuses de silence » Ashley Judd, Susan
Fowler, Adama Iwu, Taylor Swift et Isabel Pascual, toutes plaignantes contre
Weinstein.
Il ne s’agit donc pas seulement d’un cas de harcèlement
sexuel, mais aussi d’un bûcher des vanités où beaucoup d’argent est en jeu.
Hollywood est une fabrique de rêves, mais aussi un univers impitoyable dont, il
y a encore peu de temps, Weinstein détenait les clefs. Et les candidates
devaient s’acquitter d’un prix d’entrée, bon gré, mal gré. On pourrait ici se
livrer à de longues considérations anthropologiques. « Que veulent-elles au
juste ? » se demandait Freud à propos du plaisir féminin. Il me semble
raisonnable de constater ceci : pour l’homme, la sexualité est une fin en soi
alors que pour les femmes, il s’agit d’un moyen… pour trouver un protecteur,
pour avoir un enfant ou, mais oui, pour obtenir un poste plus élevé.
Dès lors, le tabou de la « promotion canapé » est
d’autant plus hypocrite dans le cas d’Hollywood, lieu par excellence où le sexe
est une activité de promotion sociale, un moyen pour les actrices d’entrer en
contact avec un producteur. Je dis bien, les actrices… les dirigeants sont
quasi exclusivement masculins. [Là aussi, on pourrait dire que les femmes aiment
davantage être vues, contemplées, admirées que les hommes, plus portés vers le
pouvoir et l’instrumentalisation.] À l’insu de Weinstein, en 2011,
l’actrice Melissa
Thompson a enregistré un petit film dans lequel on voit le
producteur se livrer à des attouchements sur sa personne… des pratiques qu’elle
encourage plutôt qu’elle ne les repousse ! N’importe quel avocat découpera
cette « preuve » en morceaux.
Qu’une femme adulte se retrouve dans une situation
aussi équivoque sans l’avoir cherché me semble pour le moins douteux. Weinstein
lui avait déjà proposé un « massage » lorsqu’il l’avait croisée à Cannes. Abus
de pouvoir ? Sans doute. Mais le terme viol pose problème dans une culture de
permissivité où les affaires se négocient d’une façon aussi « particulière » —
selon une règle tacitement acceptée de tous. Voilà qui jette une ombre sur les
déclarations des plaignantes. La défense ne s’y est pas trompée en invoquant le
consentement réciproque, ce qui est largement avéré, mais qui ne suffit pas
dans un contexte d’experts en communication pas toujours très nets. Tout est
une question de prix.
Malheureusement pour lui, Weinstein était l’homme le
plus puissant d’Hollywood… mais aussi celui qui contrôlait le moins ses
pulsions : il dépensait de plus en plus pour acheter le silence d’anciennes
collaboratrices qui le menaçaient d’un procès. Outre l’article du NYT cité
ci-dessus, un autre, publié en 2007, avait allumé le feu en révélant ces
pratiques qui duraient depuis déjà des décennies et du coup, bien des actrices
avaient soudain retrouvé la mémoire et s’étaient mises à déposer des plaintes
pour viol et abus sexuel.
[Autrement
dit, ces « actrices », demi-habiles et demi-mondaines, n’avaient pas obtenu de compensation
financière contrairement aux autres solliciteuses. Dès lors, c’était bien moins
le « harcèlement » de Weinstein qui les gênait que de ne pas être parvenues à
convertir ce « harcèlement » en chantage et extorsion de fonds.]
Et c’est ainsi qu’en 2018, Weinstein se retrouva avec
une trentaine de plaintes supplémentaires pour un montant minimum de 25
millions de dollars, soit 22,4 millions d’Euro, une somme qui correspondait par
ailleurs au montant des indemnités versées par ses compagnies d’assurances pour
la faillite de son entreprise. Que Mimi Haleyi dépose plainte douze ans après
les faits, alors qu’elle était restée en relation avec Weinstein longtemps
après, renforce la suspicion. L’heure des comptes ou comment Weinstein devint
l’inépuisable vache à traire de toutes les quérulentes. Là aussi, le métier
d’avocat diffère sensiblement par rapport à nos habitudes européennes.
Aux États-Unis, les avocats suivent la règle du « no cure no pay », pas de résultats,
pas d’honoraires. En d’autres termes, ils se paient sur la bête et touchent un
pourcentage sur les indemnités de leurs clients, d’où leur mentalité de
cow-boys du barreau, de véritables chasseurs de primes, toujours en quête d’une
éventuelle « victime » dont le dossier leur rapportera beaucoup.
Dans le monde des affaires, il ne reste pas beaucoup de
place pour la morale et les beaux sentiments. En l’occurrence, tout le paradoxe
tient dans ce que la rancune d’actrices éconduites et âpres au gain a fini par
produire l’étrange phénomène MeToo !
: un mélange d’indignation morale, d’activisme LGBT, de misandrie, le tout avec
le soutien [pour le moins suspect] des médias.
L’hystérie spectaculaire hollywoodienne semble bien
avoir contaminé MeToo depuis
le début : la chasse au prédateur sexuel, réel ou imaginaire, est ouverte à
l’échelle planétaire, avec un défilé continu de bas-bleus, de grévistes du
sexe, de folles castratrices, toutes bien décidées à en finir avec la «
domination patriarcale. » Je suis le bouc, pourrait déclarer Weinstein, chargez-moi
de tous les péchés du monde. En tout cas, plus rien ne sera comme avant :
messieurs, vous êtes prévenus, surveillez votre langage et où vous posez les
mains.
Ce néo-puritanisme, ultime variante du politiquement
correct, nuit au genre humain tout entier et provoque des effets
involontairement comiques : en Flandre, un gynécologue, Jeff Hoeyberghts, vient
d’en faire les frais après avoir déclaré que les femmes « n’osaient plus ouvrir
les jambes. » En effet, on peut se poser la question du devenir de la sexualité
dans un monde où les hommes sont considérés par avance comme des prédateurs
sexuels. Weinstein, hélas pour lui, inaugure ce nouveau monde alors que son cas
s’avère beaucoup plus nuancé, plein de zones grises. Pour ma part, je préfère
encore les Femen à cette pudibonderie : au moins, elles célèbrent la beauté du
corps féminin et elles ne manquent pas d’allure. Oui, brûlons les
soutiens-gorge !
*
Note : on trouve également des (ex)prostituées dans les
rangs des Femen, ce louche mouvement d’origine ukrainienne que les médias
bruxellois soutiennent tout autant qu’ils approuvent les persécutrices de
Weinstein.
Un véritable travail d’investigation consisterait à
enquêter sur les réseaux qui financent ces associations omniprésentes et
juridiquement omnipotentes. À terme, il est clair que leur but consiste en une
révision complète du système légal. D’autre part, il faut remarquer que la
cible des néo-féministes est exclusivement l’homme occidental.
Jamais des Femen ne s’en prennent aux pays musulmans, aux migrants violeurs, pas plus qu’à des institutions aussi machistes et inégalitaires que la franc-maçonnerie ou la monarchie. À cet égard, il est tout à fait bizarre qu’aucune association féministe ne se soit manifestée pendant le procès Wesphael ou pendant le scandale de la paternité cachée du polygame Albert de Saxe-Cobourg Gotha.
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