« La vie est avant tout chose psychique »

 

Source : Le Tarot initiatique, symbolique et ésotérique par Edmond Delcamp, édition Le Courrier du livre.

Dans le glaive, Oswald Wirth voit l’image de la justice immanente ou du karma, c’est-à-dire que, pour lui, le Glaive signifierait que tout acte mauvais porte en lui le principe de son châtiment, que ce châtiment est inévitable et se déclenchera avec un véritable automatisme. Je crains qu’il n’y ait là une notion un peu matérielle du karma. Le karma n’est pas un mécanisme fonctionnant de manière automatique, comme les machines que créent les hommes, comme les robots. S’il en était ainsi, le rôle de la divinité serait singulièrement robotisé.

Il ne faut pas penser, lorsqu’un homme a commis une action mauvaise, qu’automatiquement, il va se trouver dans le cours de l’existence suivante en présence de la même situation, mais pour cette fois subir le mal au lieu de le commettre. S’il en était ainsi, il y aurait de toute nécessité, de nécessité irrévocable, quelqu’un qui se trouverait contraint de commettre contre lui l’acte qu’il avait lui-même commis contre un autre et qui, ne pouvant pas ne pas commettre cet acte puisque le « pécheur » devrait automatiquement le subir, s’en chargerait cependant. On aurait ainsi un cycle ne prenant jamais fin où les hommes seraient alternativement criminels et justiciers mais dans l’un et l’autre cas victimes.

Il faut avoir une autre conception du karma. Il ne faut pas oublier que la vie est une évolution continuelle et que ce qui compte surtout, c’est le point d’évolution atteint au moment où l’une des incarnations prend fin. Et l’acte néfaste autrefois peut, depuis, avoir été autrement compris par l’homme évolué. Il peut alors avoir éprouvé ce qu’a ressenti l’être qui avait par lui souffert. Par cette voie, il a pu s’épurer de l’action condamnable. Cela s’est passé entièrement sur le plan psychique sans qu’aucun gendarme porte-glaive ait eu à intervenir pour exécuter la décision d’aucun juge. La vraie vie de l’homme est celle qui se déroule sur le plan psychique supérieur.

Si l’acte n’a pas été épuré, il faudra dans une incarnation suivante que cette épreuve se produise, mais elle ne sera pas nécessairement la reproduction exacte de la même situation demandant l’intervention de quelque bourreau. Sans doute, si notre homme se trouve dans un milieu de violence, la même situation pourra-t-elle se trouver, par exemple, lié à un être très cher qui subira, lui, cette situation pour une raison ou pour une autre et celui qui aura autrefois été criminel vivra alors l’épreuve plus intensément dans la douleur de son cœur aimant que ce que l’autre la vivra dans sa chair. 

Il comprendra alors plus profondément tout ce qu’il peut y avoir de souffrance dans le cœur de l’homme. Il pourra même se trouver dans le cas d’un juge ou d’un médecin devant qui défileront les auteurs d’actes analogues à celui qu’il avait commis et la nécessité de comprendre pour frapper ou guérir le fera se mettre à la place des malheureux et vivre psychiquement, intensément, ce que ceux-ci auront subi dans leur vie matérielle.

Or, la vie est avant tout chose psychique. C’est par la voie psychique bien plus que par la répétition matérielle d’un acte que l’homme peut s’élever au-dessus de la mentalité qui l’avait conduit à cet acte. De même l’épuration d’un acte criminel peut se faire par la lutte contre la tendance à répéter cet acte dans une nouvelle incarnation. La violence des tentations poussant à reprendre la même voie de perdition et la lutte contre cet appel des puissances inférieures, grâce à ce qui peut être compris, alors que, dans le kamalooga, l’individu réfléchissait sur l’incarnation venant de se terminer, sont un moyen normal de remonter la pente. 

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