Ciel, mon marxiste !

 

Source : Sur le Banquet, la philosophie politique de Platon par Leo Strauss, éditions de l’Éclat, collection Polémos.

Eros est lié au déshabillage. La philosophie est un déshabillage au plus haut niveau, au niveau de l’esprit. La vie politique n’est jamais une vie de déshabillage. Je puis également formuler cela de la manière suivante : la vie politique est bien évidemment une vie publique. La vie érotique est une vie privée, et par conséquent, il y a une tension fondamentale entre les deux. Je peux illustrer cela de la manière suivante : il y eut un homme qui en un sens a exigé une politisation absolue, et cet homme fut Marx.

Marx a parlé de la collectivisation de l’homme que la société communiste provoquerait. Toute sphère privée, toute propriété privée, comme tout malheur, seraient liés à la division du travail, et par conséquent, la société parfaite sera une société dans laquelle la division du travail sera complètement abolie. Mais le même Marx, au moins dans ses écrits de jeunesse, mentionne le fait que la racine de la division du travail est la dualité des sexes.

Il dit expressément que l’acte fondamental de la division du travail est l’acte sexuel. La conclusion paradoxale en serait que le communisme parfait devrait abolir la différence sexuelle et produire des hommes in vitro.

Nous n’avons pas à rechercher si Marx a eu ou non cette intention, mais cela montre seulement que si vous pensez jusqu’au bout le problème du public, de la publicité, de la collectivisation, vous verrez avec la plus grande clarté qu’il y a quelque chose de fondamentalement et d’absolument irréductible en l’homme au niveau le plus massif, la vie érotique, qui s’accorde sur ce point avec la vie de l’esprit et qui n’est pas susceptible d’être collectivisé. 

Commentaires