Si l’affirmation « je suis
athée » n’est qu’une décision biographique, cela veut dire aussi qu’elle
n’est pas nécessaire. Déjà Nietzsche avait reconnu dans la « mort de
Dieu » tout autre chose qu’un accident personnel. Là où il y a le
« je », l’identité d’un moi, « Dieu n’est pas mort. » C’est pourquoi la contestation décisive de
Nietzsche porte sur la conscience ou sur l’identité du je. Quand Feuerbach
déclare : « l’athéisme est le secret de toute religion »,
voulant dire que là où l’homme conçoit, adore, aime Dieu, c’est nécessairement
l’être humain, mais comme absolu et sacré, qui est pressenti, il montre bien, à
son insu néanmoins, que pour autant qu’on a transposé le divin, mais qu’on ne
l’efface pas — l’effacer ne pouvant consister simplement à le nier ou à
l’écarter, mais à lui substituer une possibilité encore inaperçue, c’est-à-dire
l’ouvrir à une dimension radicalement autre — , il est dérisoire de prétendre
avoir rompu avec l’ère théologique.
Maurice Blanchot : L’Entretien infini

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