« Une parole qui se parle elle-même »

Dans le sermon 53, citant la remarque d’Augustin sur la contradiction qu’il y a à parler du Dieu « ineffable » (La Doctrine chrétienne, 1, 6), Eckhart analyse le fait que la nature divine est simultanément inexprimable et pourtant, exprimée. « Dieu est une parole qui se parle elle-même » déclare-t-il. Le Père est un acte qui parle [ein sprechende Werk] et le Fils, une parole en acte [ein Spruch wirkende]  En conséquence, la naissance du Fils dans l’âme se ramène à ceci : parler le Verbe simultanément à l’intérieur, c’est-à-dire dans le silence éternel, et à l’extérieur, c’est-à-dire dans la création et le soutien dans l’être de toutes choses. Robert Forman a très justement dit de cette « dynamisation du silence » que c’était un aspect crucial du mysticisme d’Ekhart. Encore faut-il rappeler que cette dynamisation ne vient pas de nous, mais bien, essentiellement de Dieu.

Bernard McGinn : Maître Eckhart, l’homme à qui Dieu ne cachait rien

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